Écritures, billets, nouvelles, contes, brachygrammes, poésies, prosoésies, ludilemmes, romans...

Découvrez les lalbehyrinthes, partez en exploration, perdez-vous éventuellement… Chacun d’eux possède une issue, mais chaque sortie conduit irrémédiablement vers un nouveau dédale. Les textes s’imbriquent et tissent une toile dont le motif général pourrait être le mien, ou celui de tout autre personnage, selon mon humeur. Bref, la vérité est – sans doute – ailleurs, ou ici, ou nulle part.

vendredi 17 juin 2011

Horloge andronique (γ – Apéliote, braise levantine)

J’ai goûté la terre, son goût métallique – et le crissement qu’elle provoque sous mes dents. En d’autres temps, j’aurais juré la chose abjecte, mais les circonstances me façonnent, me laminent surtout, formant sur ma chair des monticules de stupéfaction, des cicatrices interdites. Je ne sombre pas, l’océan est trop éloigné pour m’ensevelir, le sol lui-même ne s’ouvre ni ne m’engloutit ; je ne sombre pas, le vent jamais ne m’emportera, je savoure la glaise dont mon corps se leste, je me gave de boue, je m’alourdis. Tout plutôt que la douloureuse ivresse de l’amertume.
Mes pupilles ont vibré et mes paupières, closes enfin, m’ont suggéré des landes, d’abord stériles. Le soleil s’y est levé, l’eau y a gravé son nom et, peu à peu, quelques animalcules ont été générés. Merveille que la vie liminaire, dans son balbutiement, dans son enivrante éternité ! La glèbe s’est faite fertile, les moisons se pâment, les céréales se multiplient à l’infini, tel l’humain biblique, tel le cancrelat. J’ai croqué la pulpe des fruits, la saveur en était aigre, aussi décevante que l’existence.
Tu as soufflé sur mes cils, avec fraîcheur, tu as saisi mes épaules, tu as posé ta peau contre la mienne, ton sexe contre le mien et le souvenir trace sous mon épiderme des coursives minuscules où s’agite un fiel, comme une gale amoureuse. Ta silhouette se dessine par bribes, erratique, fantomatique, la lumière transperce ta chevelure, de l’intérieur le flamboiement t’illumine, comme des viscères dévorés de feu. Les flammes ont consumé tout lien, avec cérémonie et une certaine grandeur, voire théâtralité, les flammes ont léché tes pieds et tu n’es plus.

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Le printemps passe

Les oiseaux crient

Les yeux des poissons portent des larmes
(Bashō Matsuo)
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