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Découvrez les lalbehyrinthes, partez en exploration, perdez-vous éventuellement… Chacun d’eux possède une issue, mais chaque sortie conduit irrémédiablement vers un nouveau dédale. Les textes s’imbriquent et tissent une toile dont le motif général pourrait être le mien, ou celui de tout autre personnage, selon mon humeur. Bref, la vérité est – sans doute – ailleurs, ou ici, ou nulle part.

mercredi 22 décembre 2010

Météore (JPH n°100)

Texte à consigne du forum À vos plumes sur le thème "Il y a 100 ans, en 1910". Devaient également être inclus les homonymes suivants de 100 : sans, s'en, sens ou sent (du verbe sentir) et sang.

J’aime Duncan, ses yeux, sa peau, tout en lui.
J’aime Duncan et il me méprise ; jamais ses regards vers moi ne se tournent, jamais sa voix ne s’immisce à mon intention. Son corps entier illumine – comète, traînée incandescente – ses ondulations en charment d’autres, son odeur aucunement ne m’appartient.
Ô Cieux, rendez-moi justice, soyez à l’image de ma passion ! Conduisez Duncan dans ma maison, qu’il y pénètre, qu’il s’y installe, qu’il y trône ! En majesté, car je veux l’idolâtrer, telle une esclave, sans limitation aucune, je veux ramper à ses pieds, je suis prête à tout.

J’aime Duncan, ses mots, ses phrases, ses intonations.
J’aime Duncan et, si j’en suis éprise, jamais ses mains ne se referment sur moi, jamais ses doigts ne comptent le nombre de mes désirs. Ses gestes ondulent, ses mouvements écorchent mes lèvres, petits stigmates du dédain. Son aura est un soleil – et c’est un poncif navrant – qui brûle tout à proximité et moi, calcinée, l’épiderme croûteux de son feu, je dépéris, je deviens folle, je me cogne contre un mur, encore et jusqu’au sang, comme une mouche épileptique.
Ô nuit, étends tes ombres sélènes sur moi, sur nous enfin ! Il s’en faudrait de si peu pour que ton intercession me comble, rapproche-le de moi, étreins-moi de son contact, de haut en bas, partout où la chair quémande !

J’aime Duncan, son inconséquence, son mépris, sa froideur même.
Ô Nyx, porte-moi dans tes bras, que je m’y love telle une enfant. Ô Nyx, fais parvenir jusqu’à moi un signe patent de mon destin et, malgré les obstacles, je m’obstinerai jusqu’au cœur de Duncan, quitte à l’en extraire sanguinolent de ma main avide.
Et là, soudainement, l’astre étincelant me hèle, le ciel enténébré se déchire d’un joyau clair qui le traverse de sa multitude, qui m’émeut. La lumière métamorphose la nuit, en éclaire les moindres recoins, embrase mes tréfonds, y transfigure l’image de mon amant. Il sera mien, les Cieux m’en sont témoins, les Cieux nimbent de leur clarté son visage et je sens poindre enfin un épilogue de jouissance.
J’aime Duncan et sa vie m’appartiendra.
J’aime Duncan, son existence, son corps, son sexe même. Et si nous avons un fils, nous le nommerons Halley.

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Le printemps passe

Les oiseaux crient

Les yeux des poissons portent des larmes
(Bashō Matsuo)
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